Paiement des pensions des retraités via Wari - L’Ipres «chipe» 3 milliards de Fcfa à la Bimao qui le…caresse

Rédigé par Dakarposte le Mercredi 3 Avril 2019 à 20:14 modifié le Jeudi 4 Avril 2019 23:59

Libération révélait que la Direction générale de la Banque des institutions mutualistes d'Afrique de l'Ouest (Bimao) avait licencié neuf agents dont des cadres ayant en charge le contrôle interne et de l’audit pour «motifs économiques». Nous notions que ces mesures sont de la poudre aux yeux puisque la banque était plombée par des prêts non remboursés mais aussi par des dossiers contentieux dont la gestion pose problème. La preuve par les affaires «Bimao-Ipres » et « Bimao-Money Express » qui ont intrigué les commissaires aux comptes.


Suite à une convention signée d'une part entre la Bimao et la société Csi fournissant la plateforme de paiement Wari et d'autre part entre la banque comme agent et la Fédération des caisses du Crédit mutuel du Sénégal (Fccms) comme sous agent, le paiement des allocations de l’Ipres  se déroulent dans le réseau de la Fccms et s'exécutent selon un schéma arrêté par les parties. D’abord, l’Ipres met à la disposition de la Bimao dans le compte courant du Crédit mutuel du Sénégal (Cms) les fonds destinés à payer les allocations. Ensuite, le paiement des allocations est effectué par le biais de la plateforme Wari et, enfin, la Bimao effectue la compensation (fonds reçus et fonds payés) entre les différents intervenants sur la base du journal de compensation fourni par la plateforme Wari. 

Cependant, à la suite de contrôles effectués et après rapprochement des comptes, il a été constaté que les montants compensés par la Bimao au profit de Wari sur la période 2010- 2014, ne sont pas exhaustivement couverts par les sommes reçues de l'Ipres pour le paiement des allocations. Il subsistait un écart de 4, 931 milliards de Fcfa  au 31 décembre 2014 que la Bimao continue de réclamer à l'Ipres pour le compte de la Fccms. 

Saisie conservatoire sur les sommes d'argent et biens de l'Ipres

En effet, à la date du 18 juin 2015, compte tenu de l'échec de toutes les démarches à l'amiable entreprises pour le recouvrement de la créance, la Bimao a demandé et obtenu une ordonnance de saisie conservatoire de 5 milliards de Fcfa sur toutes les sommes d'argent, biens immobiliers, corporels ou incorporels appartenant à l'Ipres. Par ordonnance du 02 juillet 2015, le Tribunal de Dakar a désigné un expert pour faire les comptes entre les parties avec un délai de rigueur d'un mois. Les conclusions des travaux de l'expert font état d'approvisionnements mis à disposition par l'Ipres dans le compte du Cms à la Bimao pour 21, 110 milliards de Fcfa et des paiements effectués sur laplateforme Wari par la Bimao pour 24, 143 milliards de Fcfa  soit un solde en faveur de la Bimao pour 3, 033 milliards. 
Pendant ce temps, l'ordonnance de saisie conservatoire des comptes de l'Ipres prononcée le 18 juin 2015 a été annulée sur appel de l’intéressé par l'ordonnance de référé rendu le 18 décembre 2015. Toutefois, l'ordonnance de référé du 22 décembre 2015 a validé les conclusions de l'expert et à condamné l'Ipres à payer 3, 033 milliards de Fcfa à la Bimao. 
Compte tenu des décisions judicaires, en dernier ressort, la Bimao a constitué une provision sur le reliquat de la créance pour un montant de… 487 millions FCFA au 31 décembre 2015.

Une curiosité qui a failli faire étrangler de rage les commissaires aux comptes qui révèlent : «Selon la Direction de la Banque, le reliquat de 1, 411 milliards de Fcfa non provisionné résulte des paiements effectués par l'Ipres dans les livres de la Bimao et du Cms pour les montants respectifs de 568 millions FCFA et 843 millions FCFA avant le déclenchement
de la procédure judiciaire ».

Ce qui ne semble pas convaincre les commissaires aux comptes qui assènent : «Nous maintenons notre position que le rapport de l’expert judiciaire ne fournit pas de détails des mis à disposition des fonds par l'Ipres. Dans ces conditions, il ne nous est pas possible d'apprécier le caractère suffisant de la provision constituée au 31 décembre 2015
par la Bimao et nous réaffirmons la nécessité d’une provision complémentaire à hauteur du reliquat de 1 411 millions FCFA ».
Qui plus, rappellent-ils, suite à la procédure d’appel intentée par l’Ipres, par jugement du 28 février 2017, le Tribunal de Grande Instance de Dakar a homologué le rapport d’expertise et condamné l’Ipres à payer à la Fccms et à la Bimao la somme de 3, 033 milliards de Fcfa.

 
Money Express, l’autre dossier noir de la Bimao

 Un autre dossier a intéressé les commissaires au compte. La Bimao étant adhérant dans le réseau dans le Money Express, elle a signé un contrat de partenariat (en tant que agent) avec le Crédit Mutuel du Sénégal (en tant que sous agent). Suite à plusieurs séances de compensation effectuées entre la Bimao et la Banque Régionale des Marchés, en leur qualité d'agents respectifs du Cms et de Money Express,
la société Money Express restait devoir au Cms la somme de 800 millions FCFA, créance constituée d'arriérés de paiements. Compte tenu de l'échec des démarches de règlement à l'amiable ayant conduit à la

signature d'un premier procès-verbal de conciliation en février 2014 dont les termes n'ont pas été respectés par Money Express, le montant de la créance a enregistré une variation à la hausse pour atteindre 1, 221 milliards de Fcfa. Au 31 décembre 2015, le montant de la créance s'élevait à 806 millions FCFA à payer suite à la réception de trois (3) virements de Money Express pour un montant de 415 millions FCFA.

La position de la commission bancaire

Au cours de l’exercice 2016, la Bimao a procédé à la rédaction d'un nouveau procès-verbal de conciliation comprenant les termes ci-dessous et en cours de signature et d'homologation : le paiement du reliquat de la créance en mensualités de 20 millions FCFA ; la validation de la saisie conservatoire des différents comptes de Money Express pour un montant global de 81 millions qui permettra le paiement des quatre (4) premières échéances et la confirmation de la renonciation de Money Express à la contestation de la saisie de ces comptes ;
«Pour un meilleur suivi du client, nous avions recommandé de comptabiliser ce montant dans les comptes d'engagements de la clientèle. En outre, en l'absence de suretés réelles et conformément à l'instruction 94-05 de la Bceao, la Banque aurait dû constituer une provision pour dépréciation à hauteur de la totalité de la créance soit 806 millions FCFA », notent les vérificateurs qui ajoutent : « Toutefois, du fait de la signature du procès-verbal de conciliation, la Bimao avait décidé de reclasser ce montant dans les créances saines, au 31 décembre 2015, en toute connaissance du placement en règlement préventif de la Société Money Express.
Par ailleurs, la Commission Bancaire dans son rapport de vérification a également requis la comptabilisation d’une provision de l’encours douteux à hauteur de 806 millions FCFA qui a été passée par la Banque au 30 septembre 2016. Au 31 décembre 2016, nous avons eu connaissance du non-respect du nouveau protocole en raison notamment de l'absence de reprise des activités de transfert d'argent de la
Money Express et de l’aggravation de l’encours douteux pour un montant de 300 millions FCFA ». 




Cheikh Mbacké Guissé

 
Mamadou Ndiaye
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