Procés Sonko/ Mame Mbaye Niang: les huit erreurs qui fragilisent la défense du prévenu

Rédigé par Dakarposte le Vendredi 3 Février 2023 à 23:05 modifié le Lundi 6 Février 2023 11:11

​A tort ou à raison, Ousmane Sonko est catalogué comme un fin stratège, un intraitable guetteur d’opportunités et qui sait les mettre à profit avec maestria. Que se passerait-il au tribunal de Dakar si jamais les rôles étaient inversés, c’est-à-dire s’il était dans la posture d’un plaignant, et le sieur Mame Mbaye Niang, dans celle d’un prévenu ? L’homme se serait, sans doute, levé avant le soleil et aurait devancé le juge sur les lieux. Pour sûr !


Mais là le scénario est tout autre, et le guetteur d’opportunités Sonko a, selon toute vraisemblance, trouvé le moyen de ne pas se rendre à la barre pour s’expliquer sur les graves allégations portées contre la personne de Mame Mbaye Niang. 
Les raisons brandies par ses conseils et ses affidés pour expliquer cette feinte stratégique n’ont presque convaincu personne. En revanche, ce dont l’écrasante majorité des Sénégalais est convaincue est que si le maire de Ziguinchor a créé les conditions d’un renvoi de l’audience c’est parce qu’il a l’intime conviction qu’il n’avait aucune possibilité légale et légitime pour organiser sa défense ; et que, par conséquent, le bâton du maitre des poursuites allait inévitablement lui tomber dessus. 
Et puis quoi ? Au vu de la légèreté avec laquelle cet adepte de Sweet Beauty a lâché cette bombe accusatoire dont les éclats lui sont retombés dessus, comment ne pas penser que cet homme qui se croit le nombril du monde manque totalement de rigueur ?
Quand on est à ce niveau de responsabilité et de leadership politique, on ne doit pas se laisser bêtement piéger soi-même dans une séance d’accusation publique pour laquelle on ne détient aucune once de preuve. Car, oui, il est tout à fait clair maintenant, au vu de la manière grotesque dont l’affaire est en train d’évoluer, que notre Lucky Luke national, le leader politique africain qui accuse plus vite que son ombre, ne détient pas les pièces incriminantes qui prouvent que le sieur Mame Mbaye Niang a été effectivement épinglé par un rapport de l’IGE.
Et c’est justement parce qu’il est conscient qu’il pourrait essuyer au tribunal le revers de sa vie qu’il a donné feu vert à ses conseils de nous servir une mystérieuse littérature pour expliquer sa non présence à l’audience du jeudi passé.    
L’envergure d’un homme politique digne de ce nom se mesure aussi et surtout à sa capacité à prendre instantanément conscience du poids de ses mots et de l’impact qu’ils peuvent avoir pour aujourd’hui et pour demain sur sa trajectoire.
Ousmane Sonko, et c’est bien dommage, se donne trop de liberté dans l’expression de sa pensée politique, et les infidélités qu’il n’a de cesse d’infliger à son honnêteté déclarée rendent encore plus sombre l’impressionnant volume de ses énormités verbales. 
Jeudi dernier, l’audience a été renvoyée sur demande des conseils du prévenu. Le juge a pris acte, mais vit avec la certitude que son « client » n’a plus aucun moyen d’éviter le face-à-face pour lui expliquer le bien-fondé des allégations portées contre le plaignant.
Oui, conformément à son obligation de prendre en charge les raisons de la non présence du prévenu à l’audience, le Législateur se donnera sans doute les moyens de réunir le plus rapidement possible toutes les conditions légales et légitimes pour que monsieur Sonko n’ait  plus aucun prétexte de ne pas se présenter à la prochaine audience.
Et ce jour-là, lorsque tombera un verdict défavorable au leader du Pastef, de grâce, que ses partisans et défenseurs soient assez grands pour murmurer ensemble cette seule phrase : « S’il l’avait fermée, on n’en serait pas là ! ».   
A vrai dire, nous n’osons pas penser que Sonko nous sortira encore de sous son chapeau un prétexte grossier pour ne pas se présenter à l’audience du jeudi 16 février.
Abdoulaye Wade était bien plus dur à cuire, plus teigneux que lui, et pourtant il déférait toujours aux convocations que lui servait la Justice sous le régime du président Abdou Diouf.
Nous pensons donc que pour cette fois-ci, il appréciera objectivement les sages observations de monsieur Abdoul Mbaye, ancien premier ministre du Président Macky Sall, qui, dans un long entretien accordé au chroniqueur judiciaire Pape et à son équipe de l’émission « Balance » diffusée sur Walf Tv la veille de l’audience du jeudi 02 février, martelait que la citoyenneté et la conscience d’appartenir à une République voudraient que nous répondions tous à la Justice, en toute circonstance, et quel que soit notre statut. 
Il faut que Sonko, qui ne voit comme seul horizon limite de son futur politique que la présidence de la République, saisisse cette occasion pour donner un signal fort qui prouvera que les camouflets qu’il a souvent adressés à Dame Justice et aux magistrats qui l’incarnent n’étaient que les défoulements mal inspirés d’un « enfant noir » et que désormais il va cesser de fragiliser ce maillon extrêmement important de nos institutions. 



Mamadou Ndiaye, journaliste d'investigations, Dirpub dakarposte.com

njaydakarposte@gmail.com
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