Responsable socialiste à Guédiawaye, Cheikh Mouhamadou Diop quitte Ousmane Tanor Dieng : «Le Ps est couché devant l’Apr !» dénonce-t-il

Rédigé par Dakarposte le Samedi 4 Aout 2018 à 16:34 modifié le Dimanche 5 Aout 2018 19:33

C’est un désaveu cinglant que vient d’essuyer Ousmane Tanor Dieng, tout-puissant et inamovible Secrétaire général du Parti socialiste. Après Khalifa Sall, Aïssata Tall Sall et tant d’autres socialistes de conviction qui se sont débarrassés de sa tutelle, voilà que l’un des cadres du parti les plus engagés politiquement et les plus intellectuellement assis vient de rendre sa démission. Il s’agit de Cheikh Mouhamadou Diop, responsable du parti à Guédiawaye et membre de la cellule des cadres du PS. Après avoir avalé des tas de couleuvres pendant plusieurs années de compagnonnage avec la coalition Bennoo Bokk Yaakar, ce jeune écrivain de 32 ans, amoureux du sport et très actif dans les mouvements associatifs depuis sa tendre enfance a décidé de rompre d’avec son parti de cœur. Non sans y avoir réfléchi sereinement dit-il.

C’est ainsi qu’en début de semaine il a réuni toute sa famille et ses amis politiques pour les informer de sa décision et recueillir leurs avis. Tous ont compris ses arguments et la plupart lui ont renouvelé leur soutien et leur intention de l’accompagner dans les actions qu’il entend accomplir pour le futur.

Joint au téléphone par dakarposte, Cheikh Mouhamadou Diop exprime son dépit et la patience dont il a fait preuve pendant quatre longues années pour respecter la discipline de parti. Jamais il n’a été d’accord avec la direction du PS mais il a toujours accepté les décisions de Tanor… avec beaucoup de réserves.

Premier couac, les élections locales organisées deux ans après la deuxième alternance. L’Apr décide de s’accaparer de toutes les communes sans aucune considération pour ses alliés qui, pourtant pouvaient détenir la majorité électorale dans leurs circonscriptions grâce à leur présence historique et leur ancrage sociologique dans le terroir.

«Depuis 2014, lors des élections locales j’ai vu que le partenariat politique qui nous été proposé par la coalition Bennoo Bokk Yaakar a commencé à connaître ses premières failles. Je n’avais pas accepté qu’à Mbour M. Ousmane Tanor Dieng aie en face de lui un responsable de l’Apr alors que nous sommes des alliés sérieux, et que Khalifa Sall à Dakar, Aïssata Tall Sall à Podor et Aminata Mbengue Ndiaye à Louga soient confrontés aux mêmes problèmes».

Après des explications alambiquées, Cheikh Mouhamadou Diop se plie aux décisions du parti sans être convaincu.

Puis arrive le referendum. Le Ps appelle à voter massivement oui alors que les discussions au sein du parti n’avaient pas abouti à un accord consensuel. Cheikh Diop décide voter Non. Car il trouve que non seulement le texte qui leur est soumis n’est pas arrivé à temps car les délais pour l’étudier à fond étaient trop courts mais, au lieu d’une seule question il y en avait quinze à prendre en compte. Un point critique qu’il ne manque pas de souligner mais il est mis en minorité. Il commence donc à se sentir un peu à l’étroit dans ce parti où la réflexion, l’échange et la recherche de consensus dérangent les apparatchiks. Ce qui l’amène à une introspection personnelle car il constate que ses idéaux sont foulés au pied et que ses convictions socialistes n’ont plus cour dans son parti de cœur parce que les intérêts des Sénégalais n’étaient plus la préoccupation de la direction du Ps.

Il constate que la politique économico-sociale développée par Macky Sall n’est pas conforme aux intérêts du Sénégal et des Sénégalais. Mais malgré tout, la direction du Ps continue à faire confiance à cet allié trop hégémoniste au point de le désigner candidat pour la prochaine présidentielle et ce, sans… débat. C’est l’objet de sa frustration de trop, la goutte d’eau qui a fait déborder le vase.

«Le Sénégal est en train d’être livré pieds et poings liés aux puissances étrangères… Si on regarde le cas des contrats pétroliers, l’arrivée de la chaîne française Auchan, on n’a donné aucune chance à nos commerçants, à nos hommes d’affaires, à nos structures, bref à notre tissu économique face à la concurrence internationale… Nous sommes toujours mis devant le fait accompli. J’étais donc inquiet pour l’avenir du Sénégal et je ne voulais pas faire partie de ceux qui voulaient donner un second mandat à Macky Sall parce que je n’ai pas trouvé notre collaboration satisfaisante. La question ne m’a pas été posée dans le parti mais un groupe d’individus s’est réuni pour prendre une décision derrière mon dos… Je ne me sentais plus à ma place et j’ai donc décidé, avec politesse de rendre le tablier…»

Selon Cheikh Mouhamadou Diop, «l’idée selon laquelle nous sommes à l’ère des grandes coalitions politiques est agitée pour justifier une position indéfendable. Le Ps c’est une opinion, une lecture, une grande idéologie… Nous aurions dû nous rassembler autour d’un colloque et poser sur la table ce qui doit changer, remettre en selle les conclusions des assises nationales ou du moins ce qu’il en reste et dire : voilà notre offre de collaboration pour les cinq années à venir. Mais le Parti socialiste est couché devant l’Apr».

Pour mettre fin à 18 années de militantisme dans le Parti socialiste qu’il a adopté depuis l’âge de 14 ans, Cheikh Diop a adressé une correspondance à Ousmane Tanor Dieng et à l’entourage de ce dernier depuis jeudi dernier.

Quant à son avenir politique, ce sont les événements à venir qui en détermineront le cheminement.
Mamadou Ndiaye
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