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Anna Sémou Faye, dame de fer

Rédigé par Dakarposte le Vendredi 5 Avril 2019 à 07:19

«Margaret Thatcher», «Badiène»… Les sobriquets contrastent pour d’écrire la première femme Directeur général de police nationale (Dgpn), le commissaire divisionnaire de classe exceptionnelle, Anna Sémou Faye. Rigoureuse et ferme dans le management des hommes et des femmes, cette mère de famille et fervente chrétienne n’en demeure pas moins tendre et attentionnée. 

«Madame Anna Sémou Faye, commissaire divisionnaire de classe exceptionnelle, précédemment coordonnatrice du Comité interministériel de lutte contre la drogue, est nommée Directeur général de la police nationale (Dgpn), en remplacement de Monsieur Abdoulaye Niang, commissaire de police divisionnaire de classe exceptionnelle, appelé à d’autres fonctions.»

Le communiqué du conseil des ministres du 25 juillet 2013, rendant public sa nomination est venue comme une vague, balayer tout sur son passage. C’est la fin de plusieurs décennies de monopole des hommes (la première femme Dgpn) pour un poste prestigieux et hautement stratégique.

Méconnue du grand public, chacun cherche à mettre un visage sur le nom de ce flic dont on vante les mérites. En effet, Anna Sémou Faye, peinte comme l’incarnation même de la fermeté, a été nommée, dit-on, pour débarrasser la police d’une élite qui flirte avec les voyous.  Elle était donc venue donner un coup de pied dans la fourmilière, puisque sa nomination intervient dans un contexte où la réputation de son corps d’origine a été souillée par un scandale de drogue dans laquelle son prédécesseur était éclaboussé.

Le porte-parole du gouvernement d’alors, Abdou Latif Koulibaly de dresser le portrait robot de la toute nouvelle Dgpn : «Anna Semou Faye est parmi les plus gradés de la police. Elle a été choisie pour son ancienneté, sa rigueur et son expérience (…) Nous souhaitons qu’elle remette les gens au pas, et exige le maximum de sérieux pour que la police retrouve sa bonne réputation.»

Choix ne pouvait être plus judicieux, disait-on, au regard de ses galons aussi nombreux que surprenants et de la bonne réputation que traîne l’ancienne coordonnatrice du conseil interministériel de lutte contre la drogue.

La native de Ndiobène (Mbour) ne perdit pas de temps pour siffler la fin de la récré et remettre les troupes au pas, à la sortie d’une audience avec le Président Macky Sall le 5 août 2013 faisant suite à sa prise de fonction (à huit-clos) le 30 juillet de la même année. Elle prit la ferme décision de combattre «la grande et la petite délinquance» qui mine la police conformément à l’injonction du président de la République. D’«être vigilante et ferme dans le management des homme». Une règle de conduite qu’elle a toujours imposée à ses éléments à qui elle ne cesse de rappeler la sacro-sainte devise de la police : «Dans l’honneur, au service de la loi».

Une guerre sans répit contre les «ripoux»

C’est donc le début d’une guerre sans répit contre les «ripoux». Anna a toujours mené la vie dure aux corrompus durant ses 31 ans de carrière dans les différents commissariats et directions qu’elle a eu à diriger. L’une des premières mesures a été la suppression du fameux «walu commissaire» (la part du commissaire, en wolof), du nom de ces caisses informelles créées dans la plus grande illégalité pour organiser le racket sur le réseau routier. La riposte ne s’est pas faite attendre de la part d’une certaine élite policière embourgeoisée, soucieuse de mettre la «dame de fer» loin de ses plates-bandes.  

Par un matraquage médiatique à nul autre pareil, on prête à celle à qui on colle affectueusement le sobriquet «Badiène», une attitude «asociale» : «Topato wul kène (elle toise de haut tout le monde)», «Malaise dans la Police : Anna Sémou Faye place ses hommes» ; «Anna Sémou Faye accusée de gestion clanique» ; «Anna Sémou Faye a mis en quarantaine de hauts gradés». Les accusations se multiplient.

Droite dans ses bottes, elle ne vacille pas. L’adversité, elle la connait bien pour l’avoir bravée durant tout son cursus dans la police.

Un parcours élogieux !

Née le 14 avril 1958 et titulaire d’un master en science juridique (option judiciaire), elle force les portes de la police en 1984. Elle gravit très vite les échelons après un baptême du feu réussi à la Sécurité publique comme adjointe du directeur. Elle hérite des commissariats de la Médina, puis du Plateau, ensuite de Dieuppeul et de Bel-Air avant d’atterrir au commissariat du Port, pour finir à celui de l’aéroport. Elle a aussi dirigé la Police de l’air et des frontières, la Direction de la police des étrangers et des titres de voyages, la Direction de l’inspection des services de sécurité et la Direction de la police judiciaire (DPJ).

Sur la scène internationale, sa participation remarquée à des groupes de travail internationaux (de missions d’enquête et d’identification de migrants irréguliers en Suisse et en Espagne, de négociations d’accords bilatéraux relatifs à la gestion des migrations France-Espagne et à la sécurité interne au Maroc), a renforcé sa réputation.

Un parcours auréolé de gloire qui sera couronné par sa nomination au poste de directeur général de la police nationale (Dgpn), dans une période trouble. Première femme à occuper ce poste, «Margaret Thatcher», comme on la surnomme, va diriger la police nationale d’une main ferme, pendant deux ans, avant d’être limogée en octobre 2015 pour «ses relations très heurtées» avec certains commissaires de brigades.

Sous sa tenue et les rigueurs qu’elle impose, se cache la tendresse d’une femme mariée et d’une mère attentionnée à l’égard de ses deux enfants et fervente chrétienne.




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