Un énième éboulement a endeuillé le village aurifère de Kharakhéna, dans la commune de Bembou (département de Saraya, région de Kédougou).
Selon un premier bilan provisoire, six personnes ont perdu la vie dans cet effondrement de terrain. Sans compter deux blessés qui ont été retrouvés sur les lieux. Le drame s’est produit aux environs de 1 heure du matin, dans la nuit du mardi au mercredi, sur un site d’exploitation aurifère du village.
Les témoignages recueillis sur place font aussi état de scènes de panique et de désolation, alors que les recherches se poursuivent pour porter secours à d’autres orpailleurs pris au piège dans la galerie.
D’après les informations fournies par les orpailleurs, le bilan pourrait malheureusement s’alourdir. Plusieurs personnes seraient encore coincées dans les trous au moment des faits, rendant les opérations de secours particulièrement délicates.
Le médecin Baba Camara, chef du district sanitaire de Saraya, dans la région de Kédougou, a confirmé la mort des six orpailleurs.
Recherches pour retrouver d’éventuels survivants
Des orpailleurs travaillaient sans l’autorisation requise sur le site où a eu lieu l’éboulement, a dit le chef de village, Bourayama Keïta. Selon lui, le site appartient à Afrigold, une compagnie minière. Bourayama Keïta affirme que les victimes, des hommes âgés d’une vingtaine d’années, seraient toutes de nationalité malienne. «Les deux blessés souffrent de fractures graves. Ils ont été évacués au centre de santé de Saraya pour une prise en charge médicale», a poursuivi M. Keïta.
Face à l’ampleur du drame, des moyens mécaniques ont été mobilisés, indique-t-on. Une machine de type Hyundai Poclain, appartenant à la mine de fer de Kharakhéna Mining, a été dépêchée sur les lieux afin d’appuyer les recherches et tenter de retrouver d’éventuels survivants ou d’autres victimes. Cet énième accident remet au cœur de l’actualité la question de la sécurité dans les sites d’orpaillage, où des cas d’éboulements occasionnant souvent des victimes sont fréquents.
Les services sécuritaires de la région de Kédougou procèdent souvent au démantèlement de sites d’orpaillage clandestins, dans lesquels opèrent des Sénégalais et des ressortissants d’autres pays d’Afrique de l’Ouest, entre autres...
Quand le métal jaune suscite une colère noire
Le 9 juillet dernier, vingt-trois personnes, dont le chef du village, ont été arrêtées par la gendarmerie de Saraya. Elles sont poursuivies pour exploitation illicite de substances minérales et association de malfaiteurs, à la suite d’une plainte déposée par cette compagnie minière. Leur faute : avoir exploité une partie des 500 hectares attribués à l’entreprise. Une semaine plus tard, le tribunal de Kédougou les condamnait à deux mois de prison avec sursis et leur ordonnait de libérer les espaces occupés. L’affaire de Kharakhéna met en lumière la fragilité du modèle de gestion minière dans cette partie du pays, où cohabitent difficilement exploitation industrielle et orpaillage artisanal. Sur le papier, les deux activités devraient se compléter : l’industrie apporte investissements, infrastructures et capacité d’extraction à grande échelle, tandis que l’artisanat maintient des emplois locaux et un savoir-faire traditionnel. Hélas, dans les faits, la compétition pour l’accès aux ressources provoque tensions et conflits récurrents.
Violation du Décret n° 2016-186 du 02 février 2016
Ici, Afrigold détient un permis légal sur 500 hectares, mais peine à faire fonctionner son usine, pourtant prévue pour industrialiser la production. En parallèle, elle loue du matériel pour exploiter de manière semi-mécanisée, pour ne pas dire artisanale, et emploie des orpailleurs étrangers. Ce qui est en violation des termes du permis d’exploitation pour or et substances connexes dont elle a bénéficié par Décret n° 2016-186 du 02 février 2016. Voilà ce qui nourrit le sentiment d’injustice et de dépossession chez les orpailleurs sénégalais. Ces derniers, privés de zones riches en or, voient leur activité se réduire à de longues journées d’efforts pour des résultats dérisoires. La question dépasse le simple cadre économique : elle touche à la souveraineté sur les ressources naturelles. Aux yeux des habitants, céder de vastes surfaces à une entreprise étrangère, incapable de tenir ses promesses industrielles et qui fait dans l’artisanal pour renflouer ses caisses, tout en restreignant l’accès aux populations locales, revient à affaiblir la légitimité de l’État. Le retard dans la validation d’un nouveau couloir d’orpaillage alimente l’impression d’un déséquilibre de pouvoir en faveur de l’opérateur privé.
Une agglomération de plus de 30.000 habitants
Enfin, le contexte démographique amplifie la crise : en vingt-cinq ans, Kharakhéna est passée de hameau à agglomération de plus de 30.000 habitants, en grande partie grâce à la ruée vers l’or. La raréfaction du métal jaune et l’absence de solution rapide risquent de transformer ce pôle d’attraction en foyer de chômage et de tensions sociales. Dans un pays où les zones minières sont souvent à la fois isolées et économiquement dépendantes d’un seul secteur, une telle situation pourrait dégénérer et menacer la paix locale, d’autant plus que l’insécurité a atteint des sommets ces dernières semaines au Mali voisin, dont les ressortissants sont très nombreux à Kharakhéna. Toujours est-il qu’il y a de quoi se pencher sur ce conflit qui a trop duré entre les orpailleurs et Afrigold, au moment où le gouvernement, à travers la Somisen, a largement souligné sa volonté de remettre de l’ordre dans le secteur de l’orpaillage par la mise en place d’un Comptoir national de commercialisation de ce métal précieux, dont les sorties frauduleuses du territoire national ont atteint 1 .500 milliards de FCFA sur la période 2013-2022.
Mamadou L. Ndiaye
clounjay@yahoo.fr
Selon un premier bilan provisoire, six personnes ont perdu la vie dans cet effondrement de terrain. Sans compter deux blessés qui ont été retrouvés sur les lieux. Le drame s’est produit aux environs de 1 heure du matin, dans la nuit du mardi au mercredi, sur un site d’exploitation aurifère du village.
Les témoignages recueillis sur place font aussi état de scènes de panique et de désolation, alors que les recherches se poursuivent pour porter secours à d’autres orpailleurs pris au piège dans la galerie.
D’après les informations fournies par les orpailleurs, le bilan pourrait malheureusement s’alourdir. Plusieurs personnes seraient encore coincées dans les trous au moment des faits, rendant les opérations de secours particulièrement délicates.
Le médecin Baba Camara, chef du district sanitaire de Saraya, dans la région de Kédougou, a confirmé la mort des six orpailleurs.
Recherches pour retrouver d’éventuels survivants
Des orpailleurs travaillaient sans l’autorisation requise sur le site où a eu lieu l’éboulement, a dit le chef de village, Bourayama Keïta. Selon lui, le site appartient à Afrigold, une compagnie minière. Bourayama Keïta affirme que les victimes, des hommes âgés d’une vingtaine d’années, seraient toutes de nationalité malienne. «Les deux blessés souffrent de fractures graves. Ils ont été évacués au centre de santé de Saraya pour une prise en charge médicale», a poursuivi M. Keïta.
Face à l’ampleur du drame, des moyens mécaniques ont été mobilisés, indique-t-on. Une machine de type Hyundai Poclain, appartenant à la mine de fer de Kharakhéna Mining, a été dépêchée sur les lieux afin d’appuyer les recherches et tenter de retrouver d’éventuels survivants ou d’autres victimes. Cet énième accident remet au cœur de l’actualité la question de la sécurité dans les sites d’orpaillage, où des cas d’éboulements occasionnant souvent des victimes sont fréquents.
Les services sécuritaires de la région de Kédougou procèdent souvent au démantèlement de sites d’orpaillage clandestins, dans lesquels opèrent des Sénégalais et des ressortissants d’autres pays d’Afrique de l’Ouest, entre autres...
Quand le métal jaune suscite une colère noire
Le 9 juillet dernier, vingt-trois personnes, dont le chef du village, ont été arrêtées par la gendarmerie de Saraya. Elles sont poursuivies pour exploitation illicite de substances minérales et association de malfaiteurs, à la suite d’une plainte déposée par cette compagnie minière. Leur faute : avoir exploité une partie des 500 hectares attribués à l’entreprise. Une semaine plus tard, le tribunal de Kédougou les condamnait à deux mois de prison avec sursis et leur ordonnait de libérer les espaces occupés. L’affaire de Kharakhéna met en lumière la fragilité du modèle de gestion minière dans cette partie du pays, où cohabitent difficilement exploitation industrielle et orpaillage artisanal. Sur le papier, les deux activités devraient se compléter : l’industrie apporte investissements, infrastructures et capacité d’extraction à grande échelle, tandis que l’artisanat maintient des emplois locaux et un savoir-faire traditionnel. Hélas, dans les faits, la compétition pour l’accès aux ressources provoque tensions et conflits récurrents.
Violation du Décret n° 2016-186 du 02 février 2016
Ici, Afrigold détient un permis légal sur 500 hectares, mais peine à faire fonctionner son usine, pourtant prévue pour industrialiser la production. En parallèle, elle loue du matériel pour exploiter de manière semi-mécanisée, pour ne pas dire artisanale, et emploie des orpailleurs étrangers. Ce qui est en violation des termes du permis d’exploitation pour or et substances connexes dont elle a bénéficié par Décret n° 2016-186 du 02 février 2016. Voilà ce qui nourrit le sentiment d’injustice et de dépossession chez les orpailleurs sénégalais. Ces derniers, privés de zones riches en or, voient leur activité se réduire à de longues journées d’efforts pour des résultats dérisoires. La question dépasse le simple cadre économique : elle touche à la souveraineté sur les ressources naturelles. Aux yeux des habitants, céder de vastes surfaces à une entreprise étrangère, incapable de tenir ses promesses industrielles et qui fait dans l’artisanal pour renflouer ses caisses, tout en restreignant l’accès aux populations locales, revient à affaiblir la légitimité de l’État. Le retard dans la validation d’un nouveau couloir d’orpaillage alimente l’impression d’un déséquilibre de pouvoir en faveur de l’opérateur privé.
Une agglomération de plus de 30.000 habitants
Enfin, le contexte démographique amplifie la crise : en vingt-cinq ans, Kharakhéna est passée de hameau à agglomération de plus de 30.000 habitants, en grande partie grâce à la ruée vers l’or. La raréfaction du métal jaune et l’absence de solution rapide risquent de transformer ce pôle d’attraction en foyer de chômage et de tensions sociales. Dans un pays où les zones minières sont souvent à la fois isolées et économiquement dépendantes d’un seul secteur, une telle situation pourrait dégénérer et menacer la paix locale, d’autant plus que l’insécurité a atteint des sommets ces dernières semaines au Mali voisin, dont les ressortissants sont très nombreux à Kharakhéna. Toujours est-il qu’il y a de quoi se pencher sur ce conflit qui a trop duré entre les orpailleurs et Afrigold, au moment où le gouvernement, à travers la Somisen, a largement souligné sa volonté de remettre de l’ordre dans le secteur de l’orpaillage par la mise en place d’un Comptoir national de commercialisation de ce métal précieux, dont les sorties frauduleuses du territoire national ont atteint 1 .500 milliards de FCFA sur la période 2013-2022.
Mamadou L. Ndiaye
clounjay@yahoo.fr


DRAME À KÉDOUGOU- SIX ORPAILLEURS MEURENT DANS UN ÉBOULEMENT À KHARAKHÉNA


