
e fut « une tournée historique », s'est félicité Donald Trump, qui a fait ses comptes ce jeudi 15 mai, à l'issue de trois jours en Arabie saoudite, puis au Qatar, et enfin aux Émirats arabes unis. Aviation, intelligence artificielle, armements... Dans de nombreux secteurs, les États-Unis ont décroché une pluie de contrats.
Le jackpot était prévisible. La tournée du président états-unien dans les monarchies du Golfe a tenu ses promesses. Elle s'est achevée jeudi par un bouquet final aux Émirats arabes unis, qui investiront « 1 400 milliards de dollars aux États-Unis au cours des dix prochaines années », a annoncé le président émirien, Mohammed Ben Zayed. Un accord qui implique notamment l'importation de 500 000 puces par an fabriquées par le géant américain Nvidia ; de la haute technologie ultra stratégique pour le développement de l'intelligence artificielle, secteur clé pour la diversification de l'économie émirienne.
L'Arabie saoudite, elle, a promis quelque 600 milliards de dollars d’investissements et de commandes au pays de l'oncle Sam, dont 142 milliards rien qu'en achat d’armes. Au Qatar aussi, des contrats pharaoniques ont été conclus : l'avionneur américain Boeing y a décroché une gigantesque commande de la compagnie Qatar Airways pour 96 milliards de dollars.
Des chiffres qui donnent le tournis, mais difficilement vérifiables sur le long terme. Même si le bilan de cette tournée est largement positif pour Donald Trump, l'accumulation de ces montants faramineux relève en bonne partie aussi de l'affichage politique.
Trump a décidé de renouer avec la Syrie
La tournée fut aussi prolifique sur le plan diplomatique. Mardi 13 mai, le président conservateur américain est arrivé en Arabie saoudite, première étape de sa tournée dans le Golfe. Une escale qui n'avait rien d'anodine. « Comme lors de son premier mandat, Donald Trump a effectué sa première visite officielle » à Riyad, remarque Karim Emile Bitar. « Cela montre que le centre de gravité du monde arabe s'est déplacé vers le Golfe, alors qu'il y a une trentaine ou une quarantaine d'années, c'était en Égypte », explique le chercheur, spécialiste de la politique américaine au Moyen-Orient.
Certes, le locataire de la Maison Blanche avait des affaires juteuses à conclure là-bas. Mais il y avait aussi une part de diplomatie et de politique étrangère en jeu. « Pour lui, la politique et l'économie sont indissociables du ''family business''. On est à la limite de l'enrichissement personnel », poursuit Karim Emile Bitar. De politique, il fut question encore à Riyad mercredi 14 mai, peu avant son départ pour le Qatar. Donald Trump a levé les sanctions américaines contre la Syrie et a rencontré Ahmed el-Charaa, président de la transition syrienne depuis quelques mois et la chute de Bachar el-Assad.
Cette main tendue de Washington a surpris. Elle est aussi le symbole d'une politique étrangère difficile à cerner : « Il y a à peine six mois, Ahmed el-Charaa était considéré par les États-Unis comme un terroriste dont la tête était mise à prix. Dans l'absolu, c'est une excellente nouvelle pour la Syrie. Mais les obstacles demeurent nombreux. Il semblerait que ce soit, comme d'habitude, une décision que Trump a prise individuellement, sans forcément avoir mesuré l'ensemble des conséquences », développe encore Karim Emile Bitar.
L'avion offert par le Qatar, un cadeau très encombrant
Aux États-Unis, cette tournée dans le Golfe n'a pas fait l'économie d'une polémique supplémentaire pour Donald Trump, qui s'est vu offrir par le Qatar un avion Boeing 747-8 estimé à 400 millions d'euros. C'est l'un des rares sujets qui, ces dernières semaines, a fait l'objet de critiques des deux côtés du spectre politique outre-Atlantique.
Même le patron de la majorité républicaine au Sénat, John Thune, est sceptique. Ce cadeau « soulève beaucoup de questions qui doivent encore être débattues », dit-il. Ted Cruz, le sénateur du Texas, est également embarrassé : « Je ne suis pas fan du Qatar. Et cet avion entraîne des risques de surveillance et d'espionnage. » Même écho négatif chez Rand Paul, le libertarien du Kentucky qui a fait allégeance à Donald Trump : « Après ce cadeau, je me demande si nous pourrons encore critiquer le Qatar en cas de violation des droits de l'homme. »
Les critiques restent prudentes, y compris chez les démocrates, plutôt silencieux, à l'exception notable de Chris Murphy. Le sénateur du New Jersey fustige un pacte de corruption pur et simple pour faire plier la Maison Blanche : « Évidemment, le Qatar va demander quelque chose en échange. Par exemple, des systèmes d'armement modernes, qu'en temps normal, on aurait été réticents à mettre entre les mains d'une dictature autoritaire au Proche-Orient. C'est de la corruption et c'est stupéfiant. »
Stupéfiant certes, mais les démocrates n'ont pas les forces pour faire voter une résolution au Congrès. Ils attendent le prochain débat parlementaire sur les livraisons d'armes au profit du Qatar pour forcer les élus républicains à se prononcer sur un possible conflit d'intérêts
Une tournée sur mesure pour irriter Israël
Le passage de Donald Trump au Moyen-Orient a, sans aucun doute, fait grincer des dents côté israélien. Non seulement, le président américain a préféré snober son allié et se concentrer sur l'Arabie saoudite, le Qatar et les Émirats arabes unis, mais il a également fait des annonces qui ne sont pas forcément les bienvenues en Israël, explique notre correspondante à New York, Loubna Anaki.
La volonté de Donald Trump de normaliser les relations avec la Syrie n'est sans doute pas populaire au sein de l'État hébreu. Dans un signe de rupture avec la ligne diplomatique de son prédécesseur Joe Biden, Donald Trump a également signé des dizaines et des dizaines de contrats avec l'Arabie saoudite, sans poser comme condition préalable la normalisation des relations entre le royaume et Israël. Certains des contrats signés avec le Qatar et les Émirats arabes unis portent également sur des technologies qu'Israël ne veut pas voir entre les mains de ces pays.
Ces trois jours de tournée dans le Golfe, mais aussi l'accord signé avec les Houthis du Yémen, les négociations entamées avec l'Iran, l'accord pour la libération de l'otage américain retenu par le Hamas… Autant d'éléments qui tendent à illustrer le fait que Donald Trump semble agacé par la politique de Benyamin Netanyahu et la guerre à Gaza. Même si, officiellement, la Maison Blanche assure que les relations entre les deux partenaires sont au beau fixe.
Rfi
Le jackpot était prévisible. La tournée du président états-unien dans les monarchies du Golfe a tenu ses promesses. Elle s'est achevée jeudi par un bouquet final aux Émirats arabes unis, qui investiront « 1 400 milliards de dollars aux États-Unis au cours des dix prochaines années », a annoncé le président émirien, Mohammed Ben Zayed. Un accord qui implique notamment l'importation de 500 000 puces par an fabriquées par le géant américain Nvidia ; de la haute technologie ultra stratégique pour le développement de l'intelligence artificielle, secteur clé pour la diversification de l'économie émirienne.
L'Arabie saoudite, elle, a promis quelque 600 milliards de dollars d’investissements et de commandes au pays de l'oncle Sam, dont 142 milliards rien qu'en achat d’armes. Au Qatar aussi, des contrats pharaoniques ont été conclus : l'avionneur américain Boeing y a décroché une gigantesque commande de la compagnie Qatar Airways pour 96 milliards de dollars.
Des chiffres qui donnent le tournis, mais difficilement vérifiables sur le long terme. Même si le bilan de cette tournée est largement positif pour Donald Trump, l'accumulation de ces montants faramineux relève en bonne partie aussi de l'affichage politique.
Trump a décidé de renouer avec la Syrie
La tournée fut aussi prolifique sur le plan diplomatique. Mardi 13 mai, le président conservateur américain est arrivé en Arabie saoudite, première étape de sa tournée dans le Golfe. Une escale qui n'avait rien d'anodine. « Comme lors de son premier mandat, Donald Trump a effectué sa première visite officielle » à Riyad, remarque Karim Emile Bitar. « Cela montre que le centre de gravité du monde arabe s'est déplacé vers le Golfe, alors qu'il y a une trentaine ou une quarantaine d'années, c'était en Égypte », explique le chercheur, spécialiste de la politique américaine au Moyen-Orient.
Certes, le locataire de la Maison Blanche avait des affaires juteuses à conclure là-bas. Mais il y avait aussi une part de diplomatie et de politique étrangère en jeu. « Pour lui, la politique et l'économie sont indissociables du ''family business''. On est à la limite de l'enrichissement personnel », poursuit Karim Emile Bitar. De politique, il fut question encore à Riyad mercredi 14 mai, peu avant son départ pour le Qatar. Donald Trump a levé les sanctions américaines contre la Syrie et a rencontré Ahmed el-Charaa, président de la transition syrienne depuis quelques mois et la chute de Bachar el-Assad.
Cette main tendue de Washington a surpris. Elle est aussi le symbole d'une politique étrangère difficile à cerner : « Il y a à peine six mois, Ahmed el-Charaa était considéré par les États-Unis comme un terroriste dont la tête était mise à prix. Dans l'absolu, c'est une excellente nouvelle pour la Syrie. Mais les obstacles demeurent nombreux. Il semblerait que ce soit, comme d'habitude, une décision que Trump a prise individuellement, sans forcément avoir mesuré l'ensemble des conséquences », développe encore Karim Emile Bitar.
L'avion offert par le Qatar, un cadeau très encombrant
Aux États-Unis, cette tournée dans le Golfe n'a pas fait l'économie d'une polémique supplémentaire pour Donald Trump, qui s'est vu offrir par le Qatar un avion Boeing 747-8 estimé à 400 millions d'euros. C'est l'un des rares sujets qui, ces dernières semaines, a fait l'objet de critiques des deux côtés du spectre politique outre-Atlantique.
Même le patron de la majorité républicaine au Sénat, John Thune, est sceptique. Ce cadeau « soulève beaucoup de questions qui doivent encore être débattues », dit-il. Ted Cruz, le sénateur du Texas, est également embarrassé : « Je ne suis pas fan du Qatar. Et cet avion entraîne des risques de surveillance et d'espionnage. » Même écho négatif chez Rand Paul, le libertarien du Kentucky qui a fait allégeance à Donald Trump : « Après ce cadeau, je me demande si nous pourrons encore critiquer le Qatar en cas de violation des droits de l'homme. »
Les critiques restent prudentes, y compris chez les démocrates, plutôt silencieux, à l'exception notable de Chris Murphy. Le sénateur du New Jersey fustige un pacte de corruption pur et simple pour faire plier la Maison Blanche : « Évidemment, le Qatar va demander quelque chose en échange. Par exemple, des systèmes d'armement modernes, qu'en temps normal, on aurait été réticents à mettre entre les mains d'une dictature autoritaire au Proche-Orient. C'est de la corruption et c'est stupéfiant. »
Stupéfiant certes, mais les démocrates n'ont pas les forces pour faire voter une résolution au Congrès. Ils attendent le prochain débat parlementaire sur les livraisons d'armes au profit du Qatar pour forcer les élus républicains à se prononcer sur un possible conflit d'intérêts
Une tournée sur mesure pour irriter Israël
Le passage de Donald Trump au Moyen-Orient a, sans aucun doute, fait grincer des dents côté israélien. Non seulement, le président américain a préféré snober son allié et se concentrer sur l'Arabie saoudite, le Qatar et les Émirats arabes unis, mais il a également fait des annonces qui ne sont pas forcément les bienvenues en Israël, explique notre correspondante à New York, Loubna Anaki.
La volonté de Donald Trump de normaliser les relations avec la Syrie n'est sans doute pas populaire au sein de l'État hébreu. Dans un signe de rupture avec la ligne diplomatique de son prédécesseur Joe Biden, Donald Trump a également signé des dizaines et des dizaines de contrats avec l'Arabie saoudite, sans poser comme condition préalable la normalisation des relations entre le royaume et Israël. Certains des contrats signés avec le Qatar et les Émirats arabes unis portent également sur des technologies qu'Israël ne veut pas voir entre les mains de ces pays.
Ces trois jours de tournée dans le Golfe, mais aussi l'accord signé avec les Houthis du Yémen, les négociations entamées avec l'Iran, l'accord pour la libération de l'otage américain retenu par le Hamas… Autant d'éléments qui tendent à illustrer le fait que Donald Trump semble agacé par la politique de Benyamin Netanyahu et la guerre à Gaza. Même si, officiellement, la Maison Blanche assure que les relations entre les deux partenaires sont au beau fixe.
Rfi