Dakarposte.com - Le site des scoops
Dakarposte.com
 

Ce qu'il faut retenir du premier discours du désormais 46ème président des Etats-Unis, Joe Biden

Rédigé par Dakarposte le Jeudi 21 Janvier 2021 à 03:48

Prenant la tête d'un pays déchiré par quatre années de Trump et une tentative violente de sédition, le 46ème président des Etats-Unis a mis l'accent sur l'unité, dans son discours inaugural. Il l'a fait sur un ton éminemment personnel et poignant.


"Seul un optimiste insensé peut nier les sombres réalités du moment". Dans son discours inaugural de 1933, Franklin Roosevelt n'avait pas cherché à enjoliver la situation: l'Amérique traversait l'un des crises les plus graves de son histoire, il n'était pas question de le nier. Joe Biden, ce mercredi 20 janvier, a repris le terme de "foolish" ("insensé") utilisé par son illustre prédécesseur: "Je sais qu'un discours d'unité peut avoir des allures de fantasme insensé aux oreilles de certains. Je sais que les forces qui nous divisent sont profondes et qu'elles sont réelles."

Mais l'Amérique n'a pas d'autre choix que de "mettre fin" à la "guerre incivile". De tout le discours, c'est cet "uncivil war", jeu de mots sur la "Civil War" (Guerre de Sécession"), qui a le plus frappé les esprits: les Etats-Unis sont, de fait, au bord d'une fracture presque aussi grave que celle qui les avait conduits, il y a 159 ans, à s'entre-dévorer. Des Etats-Unis confrontés à "la colère, au ressentiment, à la violence, l'anarchie, la maladie, le chômage et le désespoir". Et Joe Biden, en guérisseur des âmes, veut à tout prix raccommoder ce pays déchiré. "Toute mon âme", a-t-il dit, "est dans ceci: réunir l'Amérique, unir notre peuple, unir notre nation". La référence, pour le coup, n'était pas Roosevelt mais Abraham Lincoln.

On s'attendait à un discours d'unité. C'est dans le caractère d'un homme qui a passé plus d'un demi-siècle de vie politique à donner de grandes claques dans le dos de ses adversaires et alliés, sans faire de jaloux. Un homme débordant d'empathie et de clins d'œil complices. Mais ce n'est pas tout à fait ce Biden-là qui s'est présenté à l'Amérique. Empathique, certes, mais sur un mode sombre, presque implorant, éminemment personnel, avec une touche intime de religion. Son discours plutôt bref (21 minutes et 18 secondes), malgré une apparence sobre et même humble, ne ressemblait à aucun autre. Il était à la fois rafraîchissant et poignant - un discours d'union en suspension, entre deux moments de haine et de division.

Derrière les divisions, des points communs 

Cela ne suffira pas, bien sûr, la vie politique américaine est tellement gangrenée que les mauvaises habitudes reprendront vite le dessus. Les Républicains vont systématiquement chercher à barrer la route à Biden, surveillés par une base trumpienne qui ne leur pardonnera pas le moindre compromis, tandis qu'à l'autre bout du spectre l'aile gauche démocrate risque d'afficher son impatience et de vouloir trop obtenir, trop vite et trop tôt.

L'unité, donc. Est-ce un vœu pieux, un concept, une stratégie? C'est un discours possible, en tout cas, grâce au contrôle des deux chambres par les démocrates. Afficher cette volonté d'unité alors qu'il suffirait pour le nouveau président de s'appuyer sur sa seule majorité peut sembler un paradoxe. Ca ne l'est pas : pour des raisons tactiques (il s'agit de soigner la base ultra), Mitch McConnell, le leader des Républicains au Sénat, a systématiquement bloqué toute proposition de loi ne faisant pas l'unanimité dans les rangs des sénateurs de son parti. Même sur des sujets où un accord transpartisan aurait été possible.

Désormais majoritaires au Congrès, et donc maîtres de l'ordre du jour, les démocrates ont la possibilité de soumettre au vote des textes pour lesquels il existe une large majorité dans l'opinion publique, comme le plan de sauvetage contre la pandémie, la revalorisation du salaire minimum ou même, dans une certaine mesure, le contrôle des armes, l'immigration ou la mondialisation. Si l'Amérique s'est autant divisée, excitée comme un taureau devant un chiffon rouge par Trump, c'est parce que sa machine institutionnelle était bloquée, paralysée. Impuissante.

"Faire de grandes choses"
Biden n'a pas dit autre chose, dans son discours: "Avec l'unité, nous pouvons faire de grandes choses, des choses importantes. Nous pouvons redresser les torts. Nous pouvons procurer aux gens de bons jobs. Nous pouvons éduquer nos enfants dans des écoles sûres. Nous pouvons vaincre le virus mortel. Nous pouvons récompenser le travail et rebâtir la classe moyenne, et rendre l'assurance-maladie accessible à tous. Nous pouvons imposer la justice en matière de race et, de nouveau, faire de l'Amérique la force dominante pour le bien dans le monde."

Quel Américain ne souhaiterait pas cela? Biden, ce 20 janvier, n'a pas voulu paraphraser le célèbre "Je fais un rêve" de Martin Luther King". L'heure était trop sombre, deux semaines jour pour jour après un assaut violent contre le lieu précis d'où parlait le nouveau président. Le moment était plus à un "Nous avons un cauchemar, surmontons-le ensemble". C'est exactement cette promesse que lui a servie Joe Biden. Sans "optimisme insensé".

Recommandé Pour Vous
< >



Inscription à la newsletter






Vidéos & images