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Entretien avec Moustapha Diakhaté sans gestes barrières : « Il y a une faillite des élites dans la guerre sanitaire (…) Sonko et ses incohérences… Ce qui nous prive d’aller à la Mecque doit être valable pour tout type de rassemblement »

Rédigé par Dakarposte le Vendredi 13 Août 2021 à 16:01 modifié le Vendredi 13 Août 2021 - 16:06

La pandémie au coronavirus est aujourd’hui le sujet de toutes les discussions où toutes les sensibilités s’entremêlent. Dans cet entretien avec Dakaractu, l’ancien président du groupe parlementaire de la coalition Benno Bokk Yaakar, Moustapha Diakhaté, revient sur les differentes phases de la guerre sanitaire menée au Sénégal qui ne recueillent pas souvent son agrément.


Dakaractu - Comment analysez-vous la gestion de la pandémie depuis ses débuts au Sénégal ?
 
D’abord, je tiens à prier pour le repos de l’âme des plus de 1.500 sénégalais qui sont morts de Covid-19. Je présente mes condoléances à leurs familles et à l’ensemble du peuple sénégalais. Effectivement, l’heure est grave avec notamment ce nouveau virus qui est très contagieux. Quand vous regardez le communiqué du ministère de la santé, on se rend compte que c’est le pays tout entier qui est infecté. Aujourd’hui, le Sénégal fait partie des pays à haut risque. Autrement dit, pour quitter le Sénégal et aller vers d’autres pays, il faut montrer une patte blanche. Donc cette situation doit interpeller tous les Sénégalais.
Cependant, il faut savoir que les recommandations faites par le corps médical sont foulées au pied chaque jour par les Sénégalais. Le lavage des mains n’est pas systématique, le port du masque est devenu très rare, la distanciation, on n'en parle plus. D’ailleurs, il faut se rappeler des récentes tournées du président de la République et d’autres hommes politiques, mais aussi des rencontres de tout type. Donc, les moyens de lutte sont vraiment bafoués par les sénégalais. Ils faut donc savoir qu’à ce rythme, la catastrophe ne peut être évitée.
 
Dakaractu- Pensez-vous qu’il y a un manque de communication de la part de l’autorité ?
 
En fait, les médecins font les recommandations qu’il faut, les sénégalais savent bien comment faire pour prévenir la maladie. Mais manifestement, cela ne les empêche pas de fouler au pied tous ces messages. Ils font fi même de toutes les recommandations des autorités politiques. Soit il y’a de l’ignorance d’une bonne partie de la population sénégalaise par rapport à ce risque, soit il y’a une déviance par rapport aux recommandations de ces autorités. Ce qui m’inquiète le plus est que nous sommes dans un pays où chacun fait ce qu’il veut sans tenir compte des autres. Si nous sommes arrivés à ce niveau, c’est parce qu’il y’a un laxisme de l’État qui a favorisé cet incivisme notoire. Nous devons toutefois nous interroger sur le pourquoi, malgré les nombreux décès, pourquoi les Sénégalais font comme si tout allait bien. Cette situation doit interpeller tout le pays. D’ailleurs, le moment est venu de nous arrêter et de faire une introspection pour savoir que la voie nous avons prise n’est pas la bonne.
 
Dakaractu - La part de l’opposition dans cette guerre ?
 
Avant de parler des opposants, il faut d’abord savoir que c’est la majorité qui gouverne le pays, pas l’opposition. Ce sont plus de 16 millions de sénégalais qui ont élu un président, entouré d’une équipe pour gouverner le pays. Les autorités médicales sont irréprochables. Par contre, il y a des difficultés au niveau des autorités politiques et religieuses. Il y a des signes contraires que ces autorités montrent à chaque fois que l’exemple s’impose pour convaincre le Sénégal lambda. Au moment où l’on interdit les rassemblements, le président organise des tournées avec des foules immenses. Les églises, les mosquées et autres lieux de rassemblement sont tous remplis. Ce qui fait que manifestement, le peuple sénégalais n’a pas une ligne claire du comportement à prendre face à la pandémie. Il se pose naturellement plusieurs questions qui jusqu’à présent n’ont pas de réponses. Le message va être ambigu dans ce cas.
Pour le cas de l’opposition, moi ce qui me pose problème, c’est que les gens peuvent se mobiliser pour demander des certificats de résidence pour les Sénégalais, mais il n’en font pas autant pour engager la bataille contre le coronavirus. Ce qui est actuellement une priorité. Depuis que la pandémie est là, il est rare d’entendre des politiques inviter leurs militants sur la lutte qui doit rassembler tous les efforts. Bref, c’est l’élite sénégalaise qui a failli face au combat contre le coronavirus.
 
Dakaractu - Est-ce qu’il n’y a pas lieu de réunir toutes les sensibilités autour de cette question?
 
En effet, dès le début de la pandémie, je n’étais pas d’accord avec le président sur la démarche de convier simplement les hommes politiques. Je pense qu’il devait également le faire avec les chefs religieux et tout autre acteur qui n’est politique. Ce qu’il y a à faire, c’est de créer un consensus autour d’un certain nombre d’axes, notamment la communication sur le lavage des mains, le port du masque, l’éviction des rassemblements et d’aller se faire vacciner au cas où il y aurait suffisamment de vaccins. Ce combat, le président doit évidemment le mener avec toutes les sensibilités du pays. Sinon, nous ne parviendrons pas à gagner la guerre. Il faut aussi qu’il initie bien la presse pour ne pas laisser la voie libre aux discours anti-vaccins et qui tendent à dévier les Sénégalais de l’essentiel qui se trouve être la concentration sur la prévention. Il faut bien engager ce débat avec les professionnels des médias pour priver de parole ces gens qui sont des fanatiques.
 
Dakaractu - Concernant la vaccination, comment appréciez vous le programme ?
 
Je pense qu’à ce niveau nous devons attendre de vacciner un bon nombre de citoyens. Le Sénégal n’a pas encore suffisamment de vaccins. Mais le jour où on vaccinera 60 à 65 % des sénégalais, il faudrait instaurer le pass sanitaire comme en Europe. Autrement dit, celui qui refuse de se vacciner, doit rester chez lui pour ne pas contaminer les autres. En ce moment, le vaccin peut être considéré comme un permis de circulation de même que le port du masque, pourquoi pas? Ce sont des mesures que l’État pourra bien prendre.
 
Dakaractu - Avez-vous suivi la récente sortie de Ousmane Sonko sur la vaccination et la lutte sanitaire globalement ?
 
Personnellement, je n’aime pas commenter les sorties de Ousmane Sonko. C’est un homme à contradictions sur cette pandémie. Ce qui m’intéresse c’est ce que disent les médecins. Nous devons aujourd’hui porter le masque, laver les mains avec de l’eau et du savon, surtout aller se faire vacciner. Ce sont ces types de discours que nous devons avoir face aux Sénégalais. D’ailleurs,  il faut savoir qu’il y a d’autres hommes politiques qui se sont tu. Tout sénégalais doit maintenir la lutte contre le coronavirus.
 
Dakaractu : Nous nous acheminons vers des perspectives électorales. Et si la pandémie persistait à ce rythme…?
 
Dans ce cas, le Sénégal doit se passer des élections. On pourrait procéder à une modification de la loi avec la mise en place de délégations spéciales d’un an renouvelable plutôt que de continuer à être gouverné illégalement par des élus locaux qui ont épuisé leur mandat depuis longtemps. En clair, la lutte sanitaire reste une priorité au delà des questions électorales. L’État n’a pas le droit de laisser passer des rassemblements au moment où le variant est en train de circuler.
 
Dakaractu - Et le Magal qui se profile ?
 
Sur cette question, ma position est toujours la même. Ce qui a privé les musulmans d’aller à la Mecque, doit les priver de tout rassemblement. Depuis deux ans nous ne sommes pas allés à la Mecque. Celui qui a renoncé à aller en ce lieu saint, doit aussi accepter de renoncer à des Magal ou des Thiant à cause de la pandémie. Ces types de rassemblements, je n’y prends pas part.
 
Dakaractu- Vos perspectives politiques ?
 
Je tiens toujours à rappeler que je suis dans l’Apr. Ma soi-disant exclusion n’a été aucunement légale. Pour ce qui concerne mes perspectives politiques, les blocages sont dûs à la pandémie. Toutefois, il faut rappeler que mon combat reste toujours le même. Lutter contre un troisième mandat, travailler pour donner plus de possibilités à la société civile à disposer suffisamment de voix dans les instances de décisions et aussi travailler à réduire le pouvoir de moins de 50% de l’électorat.
En tout cas nous travaillons pour trouver une nouvelle perspective pour le Sénégal qui, après 60 ans traîne toujours les pieds...
 

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